Tuesday, November 27, 2007


selon la magasine TelQuel du maroc:
Sahara Occidental. Des indépendantistes si discrets
Par Driss Bennani / TelQuel.
Après une longue éclipse, les icônes de “l’indépendantisme de l’intérieur” préparent leur retour sur le devant de la scène. En face, l’Etat peaufine également sa stratégie.
L’Etat a-t-il finalement gagné sa bataille contre les “indépendantistes de l’intérieur” ? Depuis les événements de mai 2005, les militants sahraouis se font plus discrets et leurs sorties médiatiques, hier fréquentes, se raréfient. Sur le terrain, les figures emblématiques du mouvement sahraoui poursuivent (sans faire de bruit) leurs tournées à l’international, tandis que les bases “se tiennent à carreau”. “Ils savent
qu’il n’y a plus de tolérance de la part des autorités locales, qu’ils ne bénéficient désormais d’aucune immunité. Tout dérapage ou trouble de l’ordre public est sanctionné par des amendes ou des peines d’emprisonnement”, résume un acteur associatif à Laâyoune. Dans sa livraison du 3 novembre, le quotidien algérien El Watan publiait une interview d’Aminatou Haïdar, activiste sahraouie récemment condamnée à sept mois de prison pour “incitation à la violence”. Elle y revient sur “la situation catastrophique des droits de l’homme au Sahara occidental”, appelle à l’élargissement des attributions de la Minurso pour que la mission onusienne puisse “intervenir pour la protection des sahraouis” et ne cache pas son pessimisme quant à l’issue des négociations entre le Maroc et le Polisario. Aminatou Haïdar clôt d’ailleurs l’entretien sur cette phrase : “À quoi sert maintenant le troisième round (de négociations) si un membre du Conseil de sécurité, qui est la France, déclare publiquement qu’il est pour l’autonomie ? C’est une atteinte grave au droit international”. Sans surprises, cette énième sortie de la pasionaria sahraouie n’a pas fait de vagues. “Depuis bientôt deux ans, les indépendantistes sahraouis rabâchent le même discours, sans qu’ils n’aient de prolongements sur le terrain. Ils n’intéressent plus grand monde. Par peur ou par désenchantement, les jeunes habitants de Laâyoune ou de Smara ne les suivent plus. Le fait est là : les leaders indépendantistes sont presque totalement coupés de la population”, résume un lobbyiste sahraoui. En réalité, ils ne se sont pas encore remis d’un choc nommé “Projet marocain d’autonomie pour le Sahara”.Au début fut l’autonomie…À en croire plusieurs observateurs, la présentation du projet par Mohammed VI à Laâyoune a pris de court les principales figures indépendantistes. “À ce moment, ils ont tenté de se rapprocher des centres officieux de prise de décision pour s’informer, jauger la crédibilité de l’offre marocaine et, pour certains, espérer jouer un rôle dans ce qui se tramait sous les tentes du Sahara ou dans les salons de la capitale”, confie un membre influent du Corcas. Sur le plan international, l’offensive diplomatique menée par les émissaires du monarque a valu au Maroc le soutien, à peine voilé, de puissances internationales comme les Etats-Unis, l’Espagne ou la France. “Cela a mis le Polisario dans une situation délicate. Le Front était visiblement en perte de vitesse et cela se ressentait dans quelques communiqués maladroits ou des déclarations agressives de certains de ses dirigeants”, rappelle un politologue casablancais. Parallèlement, une nouvelle politique sécuritaire a été installée au Sahara. Selon ce cadre à la wilaya de Laâyoune, elle tient en deux mots : Tolérance zéro. “Pendant de longues années, les figures indépendantistes locales se croyaient intouchables. Forts d’une certaine immunité, ils encadraient les manifestations dans la région. Depuis quelques mois, plus personne n’échappe à la loi. Les responsables de délits sont présentés au tribunal et jugés selon les textes en vigueur”, explique notre responsable sécuritaire. Résultat : plus d’une dizaine d’indépendantistes notoires se sont retrouvés en prison après les émeutes de mai 2005. À leur sortie, et malgré l’intervention d’un puissant conseiller à l’ambassade américaine à Rabat, le ministère de l’Intérieur leur refuse toujours la constitution de deux associations ouvertement indépendantistes. Cette logique de fermeté a donné (provisoirement) ses fruits, mais tiendra-t-elle encore longtemps ?Pourtant, ils reviennent !“Le mouvement indépendantiste au Sahara s’active en fonction de l’agenda de la direction du Polisario. Ils ont deux rendez-vous importants avant la fin de l’année : les négociations avec le Maroc et le congrès du Front, annoncé pour le 14 décembre, détaille un ex-dirigeant du Front, aujourd’hui installé en Espagne. Du coup, la direction du Front tentera de mobiliser ce qu’ils appellent le front intérieur pour redonner du souffle à la machine indépendantiste”. Ce front intérieur a même déjà commencé ses tours de chauffe. “Il y a eu deux occasions ratées. D’abord celle de la commémoration de la mort de Hamdi Lambarki, manifestant sahraoui tué par des éléments des GUS en octobre 2005. La seconde est la tentative de créer, officiellement, des associations indépendantistes menées par des noms comme Ali Salem Tamek”, explique un observateur sur place. L’offensive internationale a également repris de plus belle. À Londres, Rome ou Madrid, les cercles de soutien au peuple sahraoui sont réactivés et quelques communiqués sont publiés ici et là. Mais le dernier coup d’éclat reste la procédure judiciaire instruite par le juge espagnol Balthazar Garzon concernant “un génocide commis par l’Etat marocain au Sahara”. La liste des accusés, rendue publique par la justice espagnole, cite nommément plus d’une trentaine de responsables marocains, dont les généraux Benslimane, Kadiri et Laânigri, et des civils comme Driss Basri et Yassine Mansouri. Immédiatement après la diffusion de cette liste, le Polisario a publié un communiqué où il exprimait “sa satisfaction”. Après une longue disette, le Front marquait un point, très précieux à la veille de l’ouverture du troisième round de négociations et au lendemain du discours pro-marocain de Nicolas Sarkozy. “Ce sont les services secrets du Polisario et de l’Algérie qui ont, en grande partie, monté ce dossier”, croit savoir un lobbyiste bien introduit auprès des services d’espionnage marocains, qui ajoute : “C’est notamment l’Algérie qui a insisté pour citer le nom de Yassine Mansouri, qui n’était pourtant que stagiaire à l’époque. L’efficacité et la discrétion du patron de la DGED les énervent et ils espéraient le déstabiliser avant la rencontre de Genève”. Raté : des sources judiciaires confient que le juge Garzon ne retiendra finalement pas le nom de Mansouri. Reste le prochain congrès du Polisario, prévu pour le 14 décembre à Tifariti. Le Front devra y élire sa nouvelle direction et définir les priorités du moment. “En l’absence d’une véritable opposition, l’actuelle direction sera reconduite sans problèmes”, affirme un membre de Khat Achahid, le mouvement sahraoui aujourd’hui très affaibli, qui poursuit : “Pour mobiliser les foules, le Polisario n’a qu’un moyen : embraser le Sahara et provoquer une nouvelle Intifada”. Pourtant, ce scénario semble aujourd’hui très peu probable.
source: http://www.telquel-online.com/297/maroc2_297.shtml

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