Rabat détourne un document de l’Otan
27 Janvier 2008 - Page : 24>Le Maroc ne sait plus quoi inventer pour, d’une part, affirmer la «marocanité» du territoire sahraoui, et d’autre part, accréditer l’idée de l’implication de l’Algérie dans le conflit.
Les Marocains sont sans doute têtus, mais l’Histoire l’est un peu plus. Et toutes les tentatives marocaines pour réécrire l’histoire de cette région ont été vaines et tous les essais par lesquels Rabat a voulu impliquer l’Algérie dans le conflit sahraoui ont échoué. Et pour cause! L’Organisation des Nations unies avait, dès les prémices du différend territorial au Sahara occidental, identifié les acteurs du conflit: le royaume du Maroc et le Front de libération de la Saguia El Hamra et du Rio de Oro (Front Polisario), les deux régions qui composent le Sahara occidental, ancienne colonie espagnole.Aussi est-il fait appel, aujourd’hui, à un document de l’Otan qui retrace la problématique sahraouie et dont la presse marocaine en a fait une lecture à tout le moins biaisée, n’en retenant que ce qui conforte et arrange la position marocaine. La presse marocaine fait ainsi une lecture assez curieuse du texte en question, allant jusqu’à affirmer que l’Alliance atlantique «dévoile la responsabilité de l’Algérie dans le conflit du Sahara».Rien que ça! Or, une lecture attentive du document montre que le document, attribué à l’Otan, présente en fait l’historique du dossier et les positions (connues) des parties en conflit: le Maroc et le Front Polisario. Et c’est normal que le nom de l’Algérie soit cité puisque intéressée par tout ce qui peut changer la géopolitique de la région du Grand-Maghreb.Mais de là à faire de l’Algérie la «responsable» du conflit sahraoui, voilà un Rubicon que nos confrères marocains n’ont pas hésité à franchir. Pour faire bon poids, ils font même dire à la CIJ (Cour internationale de Justice, juridiction qui dépend de l’ONU, lui donnant des avis circonstanciés sur des contentieux comme celui Sahara occidental) ce qu’elle n’a pas dit ni même pensé, tant celle-ci travaille à partir de faits et de documents prouvés. Ainsi, même les attendus de la Cour internationale de Justice sur le dossier sahraoui n’ont donc pas échappé à cette manière intéressée et manipulatrice avec laquelle les Marocains présentent les faits du conflit en question.Dans son avis rendu le 16 octobre 1975, la CIJ avait indiqué qu’elle n’a pas constaté «l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514 (XV) des Nations unies quant à la décolonisation du Sahara occidental et, en particulier, l’application du principe de l’autodétermination». Il est vrai que la CIJ relève également que des tribus du Sud marocain, qui ne sont pas sahraouies, avaient fait allégeance au sultan du Maroc vers la fin du XIXe siècle.Mais ce territoire du Sud marocain, peuplé de tribus nomades, n’est ni la Saguia El Hamra, limitrophe du Sud marocain, ni le Rio de Oro, aujourd’hui au centre du contentieux de décolonisation pris en charge par l’ONU. De fait, la question du Sahara occidental demeure un problème de décolonisation soumis aux principes énoncés par la Charte des Nations unies. Ce qui veut dire le droit des peuples coloniaux à l’autodétermination et à l’indépendance.Cette définition répond pleinement aux conditions actuelles du Sahara occidental occupé par un pays tiers, le Maroc. D’ailleurs, la résolution 1514 (XV) adoptée en juin 1960 argue du fait que «la sujétion des peuples à une subjugation, à une domination et à une exploitation étrangère, constitue un déni des droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la Charte des Nations unies et compromet la cause de la paix et de la coopération mondiale» et que «des mesures immédiates seront prises (...) pour transférer tous pouvoirs aux peuples sous tutelle et territoire non autonome, sans aucune condition (...) afin de leur permettre de jouir d’une indépendance et d’une liberté complètes».Dans ce contexte de décolonisation, le secrétaire général de l’ONU présente le 19 avril 1991, dans son rapport sur la situation au Sahara occidental, des recommandations avec pour objectif de permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit à l’autodétermination, conformément aux résolutions des Nations unies et aux accords entre les deux parties qui, rappelle-t-il, étaient le Maroc et le Front Polisario.Faire dire à un document de travail ce qu’il ne dit pas expressément - l’Otan qui, tout en présentant les acteurs, selon lui, du dossier sahraoui, participe aussi quelque part à baliser le terrain pour les Etats-Unis qui recherchent un partenaire africain pour l’installation de leur base militaire Africom - semble devenir une des prouesses de la presse chérifienne qui veut impliquer par tous les moyens l’Algérie dans un conflit dont elle n’est, de notoriété publique et diplomatique, que l’un des observateurs, au même titre d’ailleurs que la Mauritanie.Cependant, cela ne change rien au fait que la question sahraouie est un problème de décolonisation pris en charge dès ses débuts par l’ONU.
Othmane SIDDIK http://www.lexpressiondz.com/article/2/2008-01-27/49258.html
Les Marocains sont sans doute têtus, mais l’Histoire l’est un peu plus. Et toutes les tentatives marocaines pour réécrire l’histoire de cette région ont été vaines et tous les essais par lesquels Rabat a voulu impliquer l’Algérie dans le conflit sahraoui ont échoué. Et pour cause! L’Organisation des Nations unies avait, dès les prémices du différend territorial au Sahara occidental, identifié les acteurs du conflit: le royaume du Maroc et le Front de libération de la Saguia El Hamra et du Rio de Oro (Front Polisario), les deux régions qui composent le Sahara occidental, ancienne colonie espagnole.Aussi est-il fait appel, aujourd’hui, à un document de l’Otan qui retrace la problématique sahraouie et dont la presse marocaine en a fait une lecture à tout le moins biaisée, n’en retenant que ce qui conforte et arrange la position marocaine. La presse marocaine fait ainsi une lecture assez curieuse du texte en question, allant jusqu’à affirmer que l’Alliance atlantique «dévoile la responsabilité de l’Algérie dans le conflit du Sahara».Rien que ça! Or, une lecture attentive du document montre que le document, attribué à l’Otan, présente en fait l’historique du dossier et les positions (connues) des parties en conflit: le Maroc et le Front Polisario. Et c’est normal que le nom de l’Algérie soit cité puisque intéressée par tout ce qui peut changer la géopolitique de la région du Grand-Maghreb.Mais de là à faire de l’Algérie la «responsable» du conflit sahraoui, voilà un Rubicon que nos confrères marocains n’ont pas hésité à franchir. Pour faire bon poids, ils font même dire à la CIJ (Cour internationale de Justice, juridiction qui dépend de l’ONU, lui donnant des avis circonstanciés sur des contentieux comme celui Sahara occidental) ce qu’elle n’a pas dit ni même pensé, tant celle-ci travaille à partir de faits et de documents prouvés. Ainsi, même les attendus de la Cour internationale de Justice sur le dossier sahraoui n’ont donc pas échappé à cette manière intéressée et manipulatrice avec laquelle les Marocains présentent les faits du conflit en question.Dans son avis rendu le 16 octobre 1975, la CIJ avait indiqué qu’elle n’a pas constaté «l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514 (XV) des Nations unies quant à la décolonisation du Sahara occidental et, en particulier, l’application du principe de l’autodétermination». Il est vrai que la CIJ relève également que des tribus du Sud marocain, qui ne sont pas sahraouies, avaient fait allégeance au sultan du Maroc vers la fin du XIXe siècle.Mais ce territoire du Sud marocain, peuplé de tribus nomades, n’est ni la Saguia El Hamra, limitrophe du Sud marocain, ni le Rio de Oro, aujourd’hui au centre du contentieux de décolonisation pris en charge par l’ONU. De fait, la question du Sahara occidental demeure un problème de décolonisation soumis aux principes énoncés par la Charte des Nations unies. Ce qui veut dire le droit des peuples coloniaux à l’autodétermination et à l’indépendance.Cette définition répond pleinement aux conditions actuelles du Sahara occidental occupé par un pays tiers, le Maroc. D’ailleurs, la résolution 1514 (XV) adoptée en juin 1960 argue du fait que «la sujétion des peuples à une subjugation, à une domination et à une exploitation étrangère, constitue un déni des droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la Charte des Nations unies et compromet la cause de la paix et de la coopération mondiale» et que «des mesures immédiates seront prises (...) pour transférer tous pouvoirs aux peuples sous tutelle et territoire non autonome, sans aucune condition (...) afin de leur permettre de jouir d’une indépendance et d’une liberté complètes».Dans ce contexte de décolonisation, le secrétaire général de l’ONU présente le 19 avril 1991, dans son rapport sur la situation au Sahara occidental, des recommandations avec pour objectif de permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit à l’autodétermination, conformément aux résolutions des Nations unies et aux accords entre les deux parties qui, rappelle-t-il, étaient le Maroc et le Front Polisario.Faire dire à un document de travail ce qu’il ne dit pas expressément - l’Otan qui, tout en présentant les acteurs, selon lui, du dossier sahraoui, participe aussi quelque part à baliser le terrain pour les Etats-Unis qui recherchent un partenaire africain pour l’installation de leur base militaire Africom - semble devenir une des prouesses de la presse chérifienne qui veut impliquer par tous les moyens l’Algérie dans un conflit dont elle n’est, de notoriété publique et diplomatique, que l’un des observateurs, au même titre d’ailleurs que la Mauritanie.Cependant, cela ne change rien au fait que la question sahraouie est un problème de décolonisation pris en charge dès ses débuts par l’ONU.
Othmane SIDDIK http://www.lexpressiondz.com/article/2/2008-01-27/49258.html
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