Tuesday, December 15, 2009

L’icône sahraouie qui embarrasse
GRÈVE DE LA FAIM Le leader sahraoui est en grève de la faim depuis un mois. Expulsée du Maroc vers l’Espagne, cette femme réclame le droit de rentrer au Sahara occidental, où elle réside.
© EPA/2009 Aminatou Haidar se battra jusqu’à son dernier soufflepour faire entendre ses revendications: elle est Sahraouie, sinon rien.
CÉCILE THIBAUDMADRID 16.12.2009

Son campement de fortune se trouve dans un coin de l’aéroport de Lanzarote, aux îles Canaries. C’est là, sur un matelas, à peine isolée du flot de touristes qui passe, qu’Aminatou Haidar, 42 ans, militante de l’indépendance sahraouie, poursuit sa grève de la faim entamée il y a 31 jours. Là qu’elle attend de pouvoir retourner chez elle à El-Ayoun, au Sahara occidental, l’ancienne colonie espagnole sous contrôle marocain depuis 1975.
«Je rentrerai chez moi, morte ou vivante», répète-t-elle d’une voix de plus en plus affaiblie.  Pour les autorités espagnoles, l’affaire Haidar est un casse-tête insoluble: elle a été expulsée par le Maroc, mais c’est sur le gouvernement espagnol qu’elle fait pression pour qu’il trouve une solution. Les efforts diplomatiques de Madrid sont restés vains jusqu’ici. «Le temps presse et nous sommes dans une voie à peu près sans issue. La seule solution serait que les proches d’Aminatou la convainquent d’arrêter», reconnaissait hier un proche du dossier.
Passeport confisqué
Tout a déraillé le 13 novembre dernier. Aminatou Haidar, icône de la cause sahraouie, rentre de New York, où elle vient de recevoir un prix. Elle débarque à l’aéroport d’El-Ayoun. Au passage du contrôle des frontières, elle tend son formulaire de police. A la case lieu de résidence, elle a inscrit «Sahara occidental» et non Maroc. Pour les autorités de Rabat, c’est une offense: Aminatou renie sa nationalité. On lui confisque immédiatement son passeport avant de la réexpédier d’où elle vient, à Lanzarote, où son vol avait transité. Rabat exige des excuses. Elle refuse. Elle demande de rentrer chez elle et se dit prête à lutter jusqu’à la mort s’il le faut: «Mes enfants vivront sans mère mais dignement», affirme-t-elle.
Personne ne veut rouvrir le conflit
Depuis, la situation n’a fait que se compliquer. L’Espagne, qui lui a fourni, il y a des années, une carte de résidente pour raisons humanitaires, lui propose un passeport espagnol. Elle refuse. Elle est Sahraouie. Elle accuse Madrid de céder aux pressions de Rabat. Le Maroc, à son tour, l’accuse de chantage. Elle a pour elle l’opinion publique espagnole, très sensibilisée à la cause sahraouie, et compte sur l’appui d’un groupe d’artistes engagés qui reproche au gouvernement Zapatero de baisser les bras. «Si Aminatou Haidar ferme les yeux, le gouvernement espagnol sera, avec le Maroc, son bourreau», avertit l’acteur Javier Bardem, très actif défenseur de la cause sahraouie.
La sauver, oui, mais comment? s’interroge-t-on à Madrid. Personne n’a envie de rouvrir le conflit du Sahara. Ni les Nations Unies, ni les Etats-Unis, ni l’Union européenne, qui se sont bien gardés d’offrir à l’Espagne autre chose qu’un soutien moral. http://www.tdg.ch/actu/monde/icone-sahraouie-embarrasse-2009-12-15

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